Des réponses à vos questions sur le soja
Pour un petit haricot dont l’histoire remonte loin dans le temps, le soja reste un sujet controversé qui soulève encore beaucoup de questions. Qu’en est-il du soja en réalité? Commençons par le commencement.
Le soja est une légumineuse qui fait partie du régime alimentaire traditionnel asiatique depuis des millénaires. Certaines données donnent à entendre que le soja était déjà cultivé en Chine 9 000 ans av. J.-C. Il est riche en bon nombre de nutriments, notamment : vitamines du groupe B, fibres, potassium, magnésium, protéines de qualité supérieure et certains phytonutriments.
Toujours aussi populaire en Asie, le soja fait partie intégrante des régimes alimentaires traditionnels et de certains aliments : tofu, tempeh, miso et natto. De plus, le soja et les aliments à base de soja s’intègrent à bon nombre de tendances alimentaires actuelles, y compris l’alimentation végétarienne, de même qu’aux protéines végétales dont la popularité croissante surpasse celle des protéines de source animale. En plus de contribuer à favoriser un style de vie sain, le soja est d’usage courant dans les aliments fonctionnels.
Le soja est non seulement populaire dans les cultures asiatiques, mais c’est un incontournable dans les régimes végétariens et végétaliens, en plus d’aider à contrer les sensibilités ou allergies aux substances laitières. Les aliments faits à partir du soja – tofu, lait de soja, miso, tempeh et edamame – sont des éléments de base dans l’alimentation de bon nombre de gens. Contrairement à la plupart des autres sources végétales, le soja constitue une source de protéines complètes.
Les spécialistes de la santé s’accordent à dire que l’ajout au régime alimentaire d’une quantité accrue de protéines végétales est bénéfique pour la santé. Pourquoi alors ce petit haricot soulève-t-il autant de controverse? Pour mieux connaître le soja, voyons de plus près les questions et la polémique qu’il soulève, de même que ses bienfaits.
Les faits sur le soja : un sommaire
- Le soja est une source de protéines complètes et nutritives, ce qui en fait une excellente solution de rechange aux protéines de source animale.
- Il fournit un certain nombre de phytonutriments associés à la santé à long terme.
- Les fèves de soja sont une bonne source de fibres. Ces dernières renforcent la santé du système gastro-intestinal, aidant ainsi à conserver un poids santé et à préserver la santé cardiaque.
- Certains des composés contenus dans le soja (phytates et inhibiteurs des enzymes) peuvent entraver certains processus physiologiques. La présence de ces composés n’ rien d’unique ni d’alarmant, puisque la plupart des aliments de source végétale contiennent des composés similaires. S’il y a bien une chose que nous apprend la science de la nutrition, c’est qu’en général, un régime riche en aliments entiers de source végétale protège contre les maladies chroniques et favorise la santé.
- Les aliments à base de soja renferment des isoflavones qui semblent avoir un effet protecteur sur la santé, surtout s’ils sont consommés tout au long de la vie. Comme l’indiquent les régimes alimentaires asiatiques, un bon apport quotidien d’isoflavones de soja varie entre 20 mg et 80 mg.
- Règle générale, il vaut mieux éviter un apport quotidien élevé en isoflavones de soja (plus de 150 mg) provenant d’aliments et suppléments enrichis d’isoflavones. C’est particulièrement vrai pour les femmes en période ménopausique ou postménopausique à cause du risque d’un cancer du sein dépendant des œstrogènes et pour celles qui n’ont jamais consommé régulièrement d’aliments à base de soja.
- Certaines personnes sont allergiques ou sensibles au soja et doivent par conséquent réduire ou même éliminer du tout au tout leur apport en soja. Les recherches scientifiques indiquent cependant que ce groupe est relativement restreint. Cela dit, il appartient à chacun de déterminer quels aliments il doit manger.
- Si la consommation d’aliments à base de soja entraîne des effets indésirables (même en l’absence d’un diagnostic d’allergie), il est certes préférable de réduire ou d’éliminer les sources alimentaires qui procurent un apport en soja.
- Il est important de remettre en perspective la consommation de soja (ou de tout autre aliment). Les liens entre le régime alimentaire et les risques pour la santé sont très complexes. Il est fort possible que bon nombre de questions sur le soja et la santé à long terme restent sans réponse. Par ailleurs, la pondération des données scientifiques indique clairement que la consommation modérée d’aliments à base de soja − qu’ils soient entiers ou faits à partir d’isolats de protéines de soja − est tout à fait sûre pour la très grande majorité des adultes en santé qui les intègrent à un régime alimentaire sain et équilibré.
- Le conseil pratique le plus avisé, c’est de consommer des protéines de sources diverses. Au choix : les aliments entiers – légumineuses, grains entiers, viande, produits laitiers et poisson – ou encore, de bons aliments transformés. À cet égard, le soja, le lactosérum et d’autres isolats et concentrés de protéines peuvent tous être des composants d’un régime alimentaire sain et équilibré.
En conclusion, il est important de bien vous renseigner sur tout ce que vous ingérez et en connaître les effets sur votre santé. À cette fin, il faut trouver auprès de sources fiables de l’information objective sur les aliments que vous consommez. L’information en ligne sur le soja est abondante, mais il est plus difficile d’en déterminer l’exactitude. Voici quelques excellentes sources d’information : The Linus Pauling Institute’s Micronutriment Information Center, PubMed, The soja Institute, Nutrition.gov et The Nutrition Source- Harvard.edu. (en anglais)
La nature des phytonutriments et leur importance pour comprendre les liens entre le soja et la santé
Les phytonutriments sont des composés produits par les plantes pour se protéger contre leur environnement. Sans être essentiels à la survie humaine comme les macronutriments et micronutriments, ils sont toutefois bénéfiques pour la santé. Parmi les plus de mille phytonutriments répertoriés, les isoflavones du soja sont les mieux connus.
Les isoflavones forment un groupe de phytonutriments qui renferment des composés dotés d’une très faible activité œstrogénique que l’on appelle phytoestrogènes. Bien que de nombreux végétaux consommés par les humains en contiennent, le soja et ses produits dérivés en sont une excellente source pour l’alimentation humaine.
Les préoccupations au sujet du soja
Le soja contient-il des œstrogènes?
La génistéine et la daidzéine sont les principaux isoflavones de soja qui peuvent agir comme antioxydants pour aider à neutraliser les radicaux libres. Elles peuvent aussi se lier aux récepteurs de l’œstrogène dans divers tissus, même si leur activité œstrogénique est très faible, soit d’environ 1/400 à 1/1 000 du taux d’estradiol (œstrogène produit par l’humain). À ce jour, aucune étude n’a pu faire la preuve que la faible quantité d’isoflavones que renferme le soja puisse influer sur le taux d’hormone chez l’humain, y compris sur celui de l’œstrogène. En fait, une méta-analyse à grande échelle d’essais cliniques randomisés avec groupe témoin indique plutôt que la consommation d’isoflavones de soja n’a aucun effet sur les concentrations circulantes des hormones œstrogéniques chez la femme postménopausée.
Comme bon nombre d’autres nutriments, les isoflavones peuvent être bénéfiques ou problématiques. Un apport modéré peut comporter des bienfaits pour la santé, tandis qu’une quantité excessive peut être préoccupante. Une étude épidémiologique menée auprès de femmes résidant aux États-Unis révèle qu’un apport alimentaire de phytœstrogènes chez les participantes d’origine caucasienne (blanche) postménopausées en santé était de moins d’un milligramme (mg) par jour.
Le soja n’est pas le seul aliment à contenir des phytœstrogènes. Parmi d’autres qui en renferment des quantités variables, signalons les suivants :
Millet | Orge | Graines de lin | Lentilles |
Haricots | Fèves de Lima | Seigle | Trèfle |
Fenouil | Pois chiches (fèves garbanzo) | Pommes | Pousses d’alfalfa |
Céleri | Persil | Betteraves | Bok choy |
Brocoli | Choux-fleurs | Carottes | Concombres |
Champignons | Choux de Bruxelles | Algues | Courges |
Graines de citrouille | Graines de tournesol | Cerises | Olives |
Poires | Prunes | Tomates | Pruneaux |
Avoine | Riz brun | Germe de blé | Boulgour |
Levure de bière | Doliques à œil noir | Pousses de haricot mungo | Haricots blancs |
Le soja est-il bénéfique pour la santé des hommes?
Comme le soja contient des phytœstrogènes, les hommes peuvent craindre de l’intégrer à leur régime alimentaire. Pourtant, même si les œstrogènes sont des hormones qui jouent un rôle important dans le système reproducteur féminin, les hommes en produisent quand même, mais en plus faible quantité.
Les études à ce jour indiquent que le soja n’a pas d’effets néfastes sur la production de testostérone chez l’homme. Une méta-analyse de 2010 a examiné le lien entre les hormones reproductrices de l’homme − notamment la testostérone − et les aliments à base de soja, les poudres de protéines de soja et les suppléments d’isoflavones. Les chercheurs ont conclu qu’un apport de soja n’influe pas sensiblement sur le taux de testostérone. Une autre étude donne a entendre que le soja peut jouer un rôle de soutien dans la préservation de la santé de la prostate.
De nombreuses générations d’hommes asiatiques incorporent depuis longtemps le soja dans leur alimentation sans atteinte apparente à leur santé. Cela dit, il est conseillé aux hommes qui ont des doutes sur le soja et ses effets potentiels sur la santé de leur système reproducteur de consulter leur fournisseur de soins de santé.
Le soja cause-t-il des allergies?
Une allergie se produit quand le système immunitaire réagit à une protéine alimentaire qu’il perçoit à tort comme une menace. Les symptômes peuvent s’échelonner de faibles à assez graves pour mettre la vie en péril. L’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture a inscrit le soja sur sa liste des huit principaux allergènes alimentaires. En plus du soja, on y trouve les aliments suivants : lait, œufs, poisson, crustacés, blé, arachides et noix. Ensemble, ils comptent pour environ 90 % de toutes les allergies alimentaires. Il faut cependant noter qu’ils causent des allergies qui diffèrent grandement par leur incidence, leur gravité et leur symptomatologie. À titre d’exemple, comparativement aux protéines du lait et des noix, celles du soja ont un effet allergique relativement bénin chez bon nombre de gens.
Matière à réflexion :
La prévalence des allergies au lait et aux arachides est six fois supérieure à celle causée par le soja. En fait, l’incidence des allergies au soja est plutôt faible, comme le confirment des études expérimentales d’infection alimentaire à double insu avec groupe témoin placebo. Les recherches indiquent que les réactions allergiques au soja surviennent le plus souvent chez les enfants de moins de quatre ans et on s’entend pour estimer à moins de 1 % (probablement entre 0,2 % et 0,4 %) le pourcentage d’enfants véritablement allergiques au soja. De plus, 90 % des enfants ayant une réaction au soja n’en souffrent déjà plus vers l’âge de quatre ans. Sur la foi de ces statistiques, on peut assurément présumer que moins de 0,1 % des adultes (moins de 1 sur 1 000) sont allergiques au soja.
Le seuil de réaction aux allergènes alimentaires, c.-à-d. la dose orale minimale de protéines qui provoque une réponse allergique, tend à être d’un ordre de grandeur plus élevé (plus de 100 à 1 000 fois) pour le soja que pour les protéines du lait ou des arachides. En d’autres mots, il faut une quantité de protéines de soja de 100 à 1 000 fois supérieure à celle des protéines du lait ou des arachides pour déclencher une allergie chez les personnes les plus sensibles.
Chez la plupart des gens, les symptômes d’allergie au soja tendent aussi à être plus bénins comparativement à ceux d’autres allergies alimentaires. Un rapport sommaire d’études cliniques expérimentales d’infection alimentaire indique que dans 80 % des cas rapportés, les symptômes d’allergie au soja variaient de minimes à bénins et dans les 20 % restants, ils étaient modérés. Les réactions allergiques graves au soja étaient moins fréquentes. En comparaison, les symptômes des allergies au lait et aux noix variaient de minimes à bénins dans 50 % à 70 % des cas, modérés chez 20 % à 30 % des sujets et graves chez les 10 % à 15 % restants.
En résumé, même si les protéines de soja peuvent susciter des réactions allergiques chez certains, celles-ci sont moins fréquentes, plus difficiles à déclencher et généralement moins graves que celles causées pa certains autres allergènes très connus.
En cas d’allergie au soja, il vaut quand même mieux éviter les aliments suivants, ou au moins en limiter la consommation : huile de soja par pression à froid, en continu ou par extrusion; edamame; miso; natto; shoyu; aliments à teneur en soja (albumine, fromage, fibres, farine, semoule, crème glacée, lait, noix, pousses et yogourt); soja; fèves de soja (pâte, granules); protéines de soja (sous forme concentrée, hydrolysée ou d’isolat); sauce soja; tamari; tempeh; protéines végétales texturées (PVT); et tofu.
Outre les réactions allergiques réelles, certains peuvent être sensibles aux sucres et fibres « non digestibles » que renferme le soja. Tout comme les fibres et sucres présents dans la plupart des haricots et le lactose dans le lait, ces composés peuvent aussi causer un ballonnement abdominal et des gaz. L’utilisation d’isolats de protéines de soja très raffinés permet généralement d’atténuer ces symptômes, ou même de les éliminer. Leur teneur en protéines de soja est de 90 % à 92 %, tandis que celle en glucides est de seulement 3 % à 4 % (fibres de même que sucres et amidons simples et complexes).
Est-ce que tous les types de soja sont génétiquement modifiés?
Depuis un certain temps, les aliments génétiquement modifiés pour la consommation humaine soulèvent l’intérêt et font l’objet de polémiques. Les organismes dont le matériel génétique a été modifié par des techniques d’ingénierie génétique sont appelés organismes génétiquement modifiés (OGM). À l’échelle mondiale, la plus importante culture à être génétiquement modifiée est celle du soja qui représente la moitié de la superficie de culture biotechnique.
Par contre, tous les types de soja ne sont pas nécessairement des OGM. La demande des consommateurs pour un soja non génétiquement modifié ou biologique a ouvert aux agriculteurs un créneau pour les cultures non génétiquement modifiées, dont celle du soja. Pour vérifier le statut d’un produit (avec soja ou non), vous pouvez retracer le statut des aliments non génétiquement modifiés à l’aide d’un système de reconnaissance de la ségrégation. Ce processus permet aussi la traçabilité des aliments par une vérification de toutes les étapes de la culture, à partir de l’ensemencement jusqu’à la distribution, ce qui fait en sorte que le consommateur obtient des aliments cultivés pour être étiquetés biologiques ou non génétiquement modifiés.
Quel est l’impact du soja sur l’environnement?
Comme source de protéines, un certain nombre d’avantages du soja peuvent aider à réduire son impact environnemental. Conséquemment, la consommation du soja dans le cadre d’un régime alimentaire équilibré peut aussi contribuer à l’impact environnemental collectif des protéines sur l’alimentation humaine.
Parmi ces avantages, signalons la capacité de la plante de soja de se fixer au nitrogène dans l’atmosphère et de ne nécessiter que peu ou pas de fertilisant à base de nitrogène. De plus, les techniques de rotation des cultures – le soja en alternance avec le maïs ou d’autres plantes dans un même champ – peut aussi réduire les quantités de fertilisants au nitrogène que requièrent ces cultures en rotation. Autre avantage, le soja est une source de protéines végétales complètes, équilibrées et aussi nutritives que la plupart des protéines animales. Mieux encore, ces protéines sont beaucoup moins nocives pour l’environnement.
Le soja comme importante source de protéines alimentaires nous permet de consommer à un niveau inférieur dans la chaîne alimentaire, ce qui aide à réduire l’impact environnemental de notre alimentation.
Le soja influe-t-il sur la fonction thyroïdienne?
L’intérêt croissant pour le lien entre la consommation du soja et la fonction thyroïdienne s’est amorcé dans les années 1950 et 1960 et a fait depuis l’objet de nombreuses études. Au départ, on avait observé plusieurs cas de goitre chez des nourrissons qui étaient nourris à partir de formules à base de soja. Des travaux de recherche subséquents in vitro et sur des animaux ont permis aux scientifiques de découvrir qu’en forte concentration, les isoflavones de soja appelés génistéine et daidzéine pouvaient inhiber l’activité d’enzymes importantes participant à la biosynthèse des hormones thyroïdiennes.
Plus récemment, les données de 14 essais cliniques avec des sujets humains vraisemblablement en santé ont permis d’évaluer les effets des aliments à base de soja et des isoflavones de soja sur la fonction thyroïdienne. À quelques exceptions près, le produit à l’étude était la protéine isolée de soja.
Tous les essais sauf un ont montré que les effets du soja sur la fonction thyroïdienne étaient mineurs, sinon inexistants et sans pertinence clinique. Le seul essai qui a mis en évidence des effets antithyroïdiens marqués (et c’est celui qui est le plus souvent cité dans la documentation anti-soja)a été mené chez des Japonais d’âge adulte qui avaient consommé du soja rôti qui avait été mariné et conservé dans du vinaigre de riz. Comme l’étude a été menée sans définition de la teneur en protéines et isoflavones de soja dans cet aliment, et sans groupe témoin, sa pertinence est douteuse.
Une étude à grande échelle pour l’évaluation des effets précis d’un supplément d’isoflavones de soja sur la fonction thyroïdienne a regroupé des femmes postménopausées âgées de 64 à 83 ans. On leur a administré une dose quotidienne de 90 milligrammes (mg) d’isoflavones de soja ou un placebo. Leur taux d’hormones thyroïdiennes a été mesuré au début de l’étude, puis à 90 jours et 180 jours. Au bout de six mois, la différence entre leurs taux était statistiquement inapparente.
Les populations asiatiques consomment des produits à base de soja depuis fort longtemps sans pourtant aucune incidence importante de goitre. Ce constat s’avère aussi chez les végétariens qui consomment des quantités plus élevées de soja de même qu’une forte quantité de fruits et légumes renfermant des flavonoïdes connus pour inhiber l’activité des enzymes thyroïdiennes. Au nombre de ces flavonoïdes, on compte le kaempférol (dans la pomme, l’oignon et le thé vert), la naringénine (dans les agrumes) et la quercétine (dans les fruits et baies). En raison de la forte présence de ces composés dans les aliments de source végétale, les végétariens et végétaliens en consomment une quantité quotidienne relativement élevée (au moins un gramme). Pourtant, l’alimentation végétarienne n’a jamais été liée à une baisse de la fonction thyroïdienne.
Aujourd’hui, la plupart des spécialistes s’entendent pour dire que chez l’adulte dont l’état de santé est normal, l’effet des aliments à base de soja et de la protéine isolée de soja sur la fonction thyroïdienne est minime, voire inexistant. Ce constat est confirmé par une évaluation et une méta-analyse publiées en 2019 dans la revue Nature indiquant qu’un supplément de soja a peu d’effet sinon aucun sur les hormones thyroïdiennes chez les sujets en santé. Cette conclusion ne s’applique toutefois pas aux personnes dont la fonction thyroïdienne est compromise ou dont le taux d’iode est sous-optimal.
En conclusion, le soja est un aliment sain et une bonne source de protéines que la plupart des gens en santé peuvent consommer en quantités modérées dans le cadre d’un régime alimentaire globalement nutritif. Il est cependant conseillé de faire part à un médecin ou à un autre fournisseur de soins de santé de vos préoccupations au sujet de la consommation de soja en cas de certains troubles de santé et de prise de médicaments influant sur la glande thyroïdienne.
Le soja renferme-t-il des phytates?
Le phytate ou acide phytique est un composé qui se forme naturellement dans tous les aliments de source végétale comme les haricots, grains, noix et graines. Pour favoriser la croissance des semis, les végétaux emmagasinent du phosphore, un nutriment essentiel pour les plantes et les animaux. Ce phosphore est stocké sous forme de phytate (hexamétaphosphate d’inositol).
On s’inquiétait autrefois de la possibilité que certains aliments à forte teneur en phytates réduisent l’absorption de minéraux essentiels comme le fer et le zinc dans le système intestinal. Certains estiment maintenant que les phytates sont au contraire d’importants constituants des aliments qui agissent comme antioxydants naturels utiles à leur conservation, tout en contribuant aussi à préserver la santé.
Le soja renferme environ de 1,3 à 2,22 grammes de phytates par 100 grammes (poids sec). Même si certains sont d’avis que c’est un bon motif pour éviter les aliments à base de soja, il est important de noter que la plupart des grains entiers, haricots, graines et noix sont aussi riches en phytates. De nombreuses données scientifiques appuient l’importance de ces aliments (et du soja) comme éléments d’une bonne alimentation équilibrée qui favorise la santé et la longévité. Par conséquent, on peut difficilement soutenir qu’il est préférable d’éviter le soja à cause de sa teneur en phytates alors qu’une multitude d’aliments sains en contiennent des quantités comparables.
Le tableau ci-dessous montre que le soja est loin d’être le seul aliment qui renferment des phytates (ou acide phytique). En voici d’autres de consommation courante (en grammes par 100 grammes de poids sec) :
Soja | de 1,0 à 2,22 |
Maïs | de 0,72 à 2,22 |
Haricots | de 0,61 à 2,38 |
Avoine | de 0,42 à 1,16 |
Blé | de 0,39 à 1,35 |
Pois chiches | de 0,28 à 1,60 |
Riz | de 0,06 à 1,08 |
Amandes | de 0,35 à 9,42 |
Noix de Grenoble | de 0,20 à 6,69 |
Arachides | de 0,17 à 4,47 |
Noix de cajou | de 0,19 à 4,98 |
Graines de sésame | de 1,44 à 5,36 |
En conclusion, aucune donnée ne confirme que la consommation de soja entraîne un risque accru de carence en vitamines ou en minéraux.
Les bienfaits du soja
Le Japon compte le plus grand nombre de centenaires per capita. Selon certaines études, le régime alimentaire traditionnel d’Okinawa joue un rôle prépondérant dans cette longévité. Le tofu et d’autres produits du soja sont les éléments de base de cette saine alimentation. D’autres études montrent que la consommation de produits du soja au lieu de protéines de source animale maintient un profil lipidique sanguin qui se situe dans la norme.
Par ailleurs, le soja est l’un des aliments qui font l’objet du plus grand nombre d’études de recherche partout dans le monde. PubMed recense près de 14 000 articles publiés qui lui sont consacrés. La recherche épidémiologique fait état d’une association entre la consommation de soja et un risque réduit de certaines maladies, sans toutefois pouvoir expliquer clairement les mécanismes sous-jacents. Des travaux de recherche plus récents laissent entendre que les bienfaits du soja pour la santé peuvent dépendre de la capacité de l’organisme à convertir ces isoflavones en métabolites importants pendant la digestion. De plus, la composition du microbiote peut aussi influer sur les effets biologiques des isoflavones dans l’organisme.
À l’instar de protéines d’autres sources, une fois digérées, les protéines du soja se transforment en groupe d’acides aminés servant à plusieurs fins. Pour n’en nommer que quelques-unes : développement et réparation des tissus, synthèse des hormones et neurotransmetteurs, production d’hormones et d’enzymes, soutien du système immunitaire et production d’énergie. Le soja est-il bénéfique en soi ou tient-il ses effets protecteurs du fait que ceux qui en consomment en plus fortes quantités consomment aussi moins de protéines et de gras de source animale? Ces deux facteurs entrent probablement en ligne de compte, mais un nombre suffisant d’études permet de conclure que les protéines et isoflavones de soja ont vraisemblablement des effets bénéfiques directs.
Le soja renferme des protéines complètes
Contrairement à la plupart des autres protéines végétales, celles du soja sont complètes. Autrement dit, elles renferment les neuf acides aminés essentiels : histidine, isoleucine, leucine, lysine, méthionine, phénylalanine, thréonine, tryptophane et valine. Comme l’organisme humain ne peut pas les produire, on les obtient dans l’alimentation.
L’échelle de mesure de l’état complet d’une protéine porte le nom de Score chimique corrigé de la digestibilité (SCCD), une norme internationale d’évaluation de la qualité des protéines. C’est une mesure comparative de la quantité équilibrée d’acides aminés dans une protéine donnée et des besoins en acides aminés de l’être humain, avec comme point de référence précis les enfants de 2 à 5 ans. La digestibilité de la protéine est aussi prise en compte (son degré de dégradation et d’absorption complète). L’échelle SCCD va de 0,0 à 1,0, ce dernier résultat indiquant que la protéine évaluée répond entièrement aux besoins humains sur le plan de la qualité.
La méthode SCCD établit que les isolats de protéines de soja, de lactosérum et de blanc d’œuf se classent à l’état complet de 1,0. Ce classement indique qu’ils ont tous une valeur nutritionnelle très élevée – et essentiellement équivalente – qui favorise la santé humaine. Le score SCCD élevé des isolats de protéines de soja met en évidence deux points importants. En premier lieu, l’être humain digère et absorbe très bien la protéine de soja. En second lieu, la protéine de soja est complète et renferme une quantité adéquate de tous les acides aminés essentiels pour la croissance, le développement et la santé de l’être humain.
En 1999, la FDA des États-Unis a autorisé pour les protéines de soja l’allégation suivante en matière de santé : à raison de 25 grammes par jour dans le cadre d’un régime alimentaire faible en gras saturés et en cholestérol, la protéine de soja peut réduire le risque de maladie cardiaque. Santé Canada emboîtait le pas en 2015 en autorisant une allégation similaire portant sur le soja et la santé cardiaque.
Cela dit, la protéine de soja n’est pas nécessairement la meilleure source de protéines pour tout le monde. Les personnes allergiques ou sensibles au soja, ou souffrant de certains problèmes de santé, devraient s’abstenir de consommer des protéines de soja, ou du moins d’en réduire leur apport. Ce conseil vaut pour d’autres allergies, comme celles aux substances laitières ou au riz.
Le soja compte parmi plusieurs sources de protéines de qualité supérieure offertes aux consommateurs. Un apport régulier de soja comme élément d’un bon régime alimentaire peut être bénéfique pour la santé. Cependant, une alimentation saine et bien équilibrée doit comprendre des protéines de diverses sources d’aliments entiers (légumineuses, grains entiers, viande, produits laitiers et poisson) et d’aliments transformés bénéfiques pour la santé.
Santé cardiovasculaire
Un lien a été établi entre la consommation de protéines de soja et le maintien d’un bon taux de cholestérol, à la condition qu’il soit normal au départ, surtout en remplacement d’une alimentation riche en protéines animales.
Bien que la FDA ait autorisé en 1999 une allégation établissant un lien entre la santé cardiaque et les protéines de soja, la FDA a maintenant entrepris une autre évaluation des données sur lesquelles l’allégation s’appuie. À partir des mêmes données ayant servi à la FDA pour autoriser l’allégation originale, une méta-analyse de 2019 mettait en évidence la valeur toujours actuelle de ces données à l’appui du raisonnement qui a étayé l’allégation originale de la FDA portant sur le soja et la santé cardiaque. Il importe de souligner que Santé Canada avait autorisé une allégation similaire en 2015. À l’heure actuelle, Santé Canada ne compte nullement réévaluer les données sur les protéines de soja et l’allégation sur la santé cardiaque établies en 2015.
Les isoflavones de soja peuvent aussi jouer un rôle dans la préservation du fonctionnement vasculaire et de la souplesse artérielle, mais d’un point de vue clinique, l’importance pour la santé de ces bienfaits du soja n’a pas encore été clairement établie.
Santé osseuse
Excellente source de protéines et de calcium, les aliments à base de soja ajoutés au régime alimentaire sont bénéfiques pour les os. Certaines données cliniques indiquent que les régimes alimentaires riches en protéines et isoflavones de soja peuvent avoir des effets de renforcement des os. Les taux de fracture des os sont généralement plus faibles chez les populations asiatiques qui consomment régulièrement des aliments à base de soja que chez les Occidentaux qui en consomment rarement.
Toutefois, comme les données sont mitigées, l’avis des spécialistes n’est pas unanime et certains concluent que la consommation d’aliments à base de et d’isoflavones de soja ne devrait pas constituer la seule approche pour empêcher ou ralentir la perte osseuse liée à l’âge. Par contre, il est conseillé de les intégrer à un programme de style de vie sain global qui comprend aussi des apports adéquats de calcium et de vitamine D, ainsi que l’exercice de mise en charge (avec poids). Ces deux facteurs favorisent la résistance et la santé des os.
Les quantités et types optimaux d’aliments à base de soja nécessaires pour renforcer la santé osseuse ne sont pas encore clairement déterminés. Des données montrent cependant que leur consommation régulière dans le cadre d’un régime riche en aliments entiers de source végétale est tout probablement utile pour conserver une santé osseuse optimale.
Santé mammaire
On croit que les deux principaux isoflavones de soja − la génistéine et la daidzéine − protègent le tissu mammaire. C’est en partie parce que ces composés agissent comme antioxydants qui aident à neutraliser les radicaux libres dans l’organisme. De plus, ces isoflavones ont une structure similaire à celle des œstrogènes et ont la capacité de se lier aux récepteurs des œstrogènes dans divers tissus (en particulier les récepteurs-β).
Même si l’activité œstrogénique de ces isoflavones est plutôt faible, ils pourrient avoir des vertus protectrices grâce à leur capacité de se lier aux récepteurs des œstrogènes et de bloquer les effets nocifs des formes d’œstrogènes plus puissantes. C’est de cette façon que la génisteine et la daidzéine peuvent agir globalement comme des anti-œstrogènes. Plusieurs études épidémiologiques ont porté précisément sur l’association entre la consommation de soja et la santé mammaire. Bon nombre d’entre elles, mais pas toutes, indiquent qu’un apport en soja peut protéger la santé des seins. Les femmes soucieuses de leur santé mammaire devraient discuter avec leur médecin ou un professionnel des soins de santé de l’usage du soja et des isoflavones de soja à cette fin.
Santé ménopausique
Des données épidémiologiques montrent une association entre les régimes alimentaires riches en soja et des symptômes ménopausiques plus bénins. Une étude portant sur des femmes de pays asiatiques du Sud-est où depuis longtemps la consommation de soja est importante, met en évidence une plus faible prévalence des bouffées de chaleur et de la transpiration que chez les femmes de pays occidentaux. D’autres travaux de recherche indiquent que même avec une consommation régulière, l’efficacité des isoflavones de soja à soulager les symptômes ménopausiques comme les bouffées de chaleur est tout au plus moyenne et qu’il faut attendre jusqu’à un an pour profiter de bienfaits modérés.
On pense aussi que le microbiome joue un rôle important dans le métabolisme des isoflavones de soja et de celui du soja dans l’atténuation des symptômes de la ménopause. Les recherches révèlent que chez les femmes dont les bactéries intestinales ont la capacité de convertir la daidzéine en S-équol – un métabolite bactérien de la daidzéine dans les isoflavones de soja – et qui prennent un supplément de soja, on observe un soulagement accru des symptômes ménopausiques que chez les femmes qui n’en prennent pas. L’équol est produit à partir de la daidzine-daidzéine par des bactéries dans la partie basse du tube digestif. L’influence des habitudes alimentaires et des communautés microbiennes de chaque femme sur l’efficacité de cette production peut aider à expliquer la disparité des bienfaits pour la santé que chacune pourra ressentir.
Même si les données des études sont mitigées quant au rôle bénéfique et à l’efficacité du soja et des isoflavones de soja pour soulager les symptômes de la ménopause, les isoflavones de soja et d’autres plantes n’en demeurent pas moins un choix non hormonal intéressant pour les femmes réfractaires au traitement hormonal de remplacement ou à qui il est déconseillé. En raison de leur sûreté et de leurs effets bénéfiques combinés à leur fonction de soutien de la santé globale, les isoflavones de source végétale constituent un bon choix pour les femmes dont la période de fertilité tire à sa fin.
Maîtrise du poids
Depuis plus de 20 ans, la consommation de protéines de soja se révèle efficace comme élément d’un régime alimentaire axé sur la maîtrise du poids. Des études menées sur des animaux ont montré les effets bénéfiques potentiels des protéines de soja ainsi que de ses isoflavones et peptides bioactifs à plusieurs égards : métabolisme du glucose et des lipides, sensibilité à l’insuline, taux métabolique, apport alimentaire et maîtrise du poids. Des études portant sur des humains indiquaient aussi qu’un apport accru de protéines de soja ou de source animale peut accélérer le taux métabolique, apaiser l’appétit et accroître la satiété.
De plus, des essais cliniques randomisés et des études cliniques portant sur la maîtrise du poids ont montré qu’une alimentation à base de protéines de soja pouvait être tout aussi efficace, sinon plus que les régimes à base de protéines du lait sur le plan de la réduction du poids et de la graisse corporelle.
En réalité, la maîtrise du poids tient bien davantage à un apport calorique réduit et à l’élimination des calories par l’exercice qu’au simple ajout de protéines de soja ou de lactosérum dans un régime alimentaire. Par contre, la capacité des protéines et des fibres à procurer une sensation de satiété plus durable peut certes contribuer au maintien d’un bon équilibre calorique.
La différence entre les aliments à base de soja fermentés et non fermentés
Les aliments traditionnels à base de soja se répartissent en deux catégories : non fermentés et fermentés. Le groupe des aliments non fermentés comprend ceux qui suivent, et qui servent surtout de nourriture : lait de soja, tofu (pâte de fèves de soja), soja et noix de soja. Le groupe des aliments fermentés comprend la pâte de soja ( le miso au Japon) et les fèves de soja fermentées (le natto japonais). La pâte de soja fermentée est généralement utilisée comme condiment dans des mets cuisinés, tandis que le soja fermenté tel quel s’intègre aussi à un repas.
Même s’il n’y a à ce jour aucun consensus scientifique sur la supériorité d’un type de soja par rapport à un autre, certains points méritent d’être soulignés :
La fermentation des aliments à base de soja accroît la biodisponibilité des isoflavones, tout en réduisant leur teneur dans les aliments. L’apport type des aliments à base de soja non fermenté est supérieur à celui des aliments à base de soja fermenté et compterait pour un pourcentage plus élevé des isoflavones alimentaires. La digestion du soja fermenté peut parfois être plus facile pour certains, même si celle des produits de soja non fermenté pose rarement problème.
Le taux de phytates dans les produits fermentés est plus faible, mais ce n’est pas là un problème si important étant donné que la teneur en acide phytique du soja non fermenté n’influe pas sensiblement sur la quantité de minéraux que consomment les personnes dont l’alimentation est généralement diversifiée. Par ailleurs, la teneur en sodium des produits à base de soja fermenté est souvent élevée, ce qui peut être préjudiciable à l’état de santé général.
Règle générale, la documentation scientifique publiée n’établit aucune distinction entre les aliments à base de soja fermenté ou non fermenté pour ce qui est de leurs bienfaits respectifs. Précisons toutefois que la plus grande partie des études publiées portait sur des aliments ou produits à base de soja non fermenté.
Une nutrition optimale prend sa source dans un régime alimentaire sain et équilibré qui intègre une diversité d’aliments de source végétale. Conséquemment, le meilleur moyen de tirer parti des bienfaits du soja pour la santé consiste sans doute à en consommer une quantité modérée, à la fois de sources fermentées et non fermentées.
Références et lectures recommandées
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